SANS TITRE
Le temps enjambe en fugitif les cases du calendrier, il fatigue les aiguilles de l’horloge, il file, sans promesse de rattrapage, il use la matière et le vivant et finit par avoir raison d’eux, en les reconduisant au monde de l’informe. Le temps s’apprécie et se jauge à l’aune d’une photo jaunie, d’une peau et de ses stigmates, d’un mur et de ses lamentations. Mais l’art ruse avec le temps, contre le temps. Coupant avec le temps du chronomètre, il invente des dispositifs pour dérouler autrement son travail. Son potentiel détourné par d’insolites manœuvres est débité en rythmes et en saveurs qui marquent définitivement de leur seau une matière se réveillant de son profond sommeil ! Une matière, sonore, visuelle, organique ou autre, est muette jusqu’à ce qu’elle soit investie dans un emploi esthétique du temps .il s’agit de trouver la rythmique, le chiffre, qui la secoue et la met en branle, qui la déploie comme une « partition »où se sont résorbées plusieurs temporalités en ce point nodal unifiant le somatique à l’affectif, le geste au désir. Lire et écrire à même des surfaces ou circulent les signes de l’alphabet, se distraire grâce aux images subalternes qui les illustrent, correspond à ce temps souvent ennuyeux de l’apprentissage où les injonctions sont légion. En réaction à ce temps scolaire vient empiéter le temps de l’œuvre qui réfère à ce temps privilégié de l’histoire de l’art, à partir de cette histoire, on institue un musée imaginaire depuis lequel on se forge notre boite à outils pour confectionner conjointement l’œuvre et le récit. Labourer au petit bonheur la surface scripturale-picturale ;amener à maturité les semences « analphabétique » de l’école buissonnière, c’est là que réside mon emploi esthétique du temps et le récit qui lui sied !
Imed jemaiel, août 2021
VERNISSAGE & AMBIANCE