``LE DESSOUS DES RATURES DE IMED JEMAIEL`` EN FILIGRANE ...
Il faut prendre son temps ; s’asseoir, regarder, scruter attentivement un détail, puis un autre, se lever, en proie au vertige, aller promener son regard ailleurs, avant de revenir, comme en un état d’hypnose, pour tenter de décoder ce monde fourmillant de signes, qui mange le cœur de la toile, grignote sur les bords, phagocyte les blancs ou le sépia, insuffle du bleu, du rouge, de l’or, s’incurve dans des entrelacs qui défont et font ce palimpseste, où s’écrivent les obsessions ? préoccupation d’un artiste-peintre qui « écrit comme on dessine et dessine comme on écrit », une infinité d’univers. Imed Jemaiel, artiste plasticien né à Bizerte en 1965, qui enseigne, par ailleurs, à l’Ecole des Beaux-Arts de Tunis, depuis 1992, expose ses œuvres à la galerie Gorgi (Sidi Bousaïd), et explose (ses) « dessous des natures » comme d’autres se laissent aller à un balancement souterrain d’une musique, venu d’un pays qui n’existe nulle part, mais, qu’il reconnaît pourtant, comme les pulsations de son propre cœur. Acrylique sur toile, ou encore, le bruissement de vie, qui qui parcourt la surface à habiller, la surface à habiter plutôt est riche d’exploration, aussi inattendue que fécondes, surplombant une écriture haletante ou comme tirée au cordeau où agent tour à tour, un œil, un autre œil, une bouche, une infinité de carnivores aux dents carnassières, des poissons, mais aussi d’autres étranges créatures qui volettent, tressautent, comme étouffées ou en apesanteur. Les natures ? Une autre signature : infiniment plus signifiantes que tous les signifiants qui auraient raison d’être, parce que désarticulés et terriblement dérangeants.
« Paysage » ? s’y perdre jusqu’à la déraison. Ce n’est, sûrement, pas donné à tout le monde…
Samia HARRAR, Mardi 15 avril 2014
Source Journal « Le temps », publié mardi 15 avril 2014 :